MIBREAST : la 3D au service de la reconstruction mammaire

Odoo • Image et Texte

Chaque année, en Belgique, on dénombre environ 9.000 nouveaux cancers du sein. Malgré l’évolution des techniques thérapeutiques, certains cas nécessitent l’ablation d’un sein. Heureusement, des scientifiques développent des techniques innovantes pour aider les femmes, qui ont dû subir une mastectomie, à se reconstruire tant d’un point de vue physique que psychologique. Parmi les recherches en cours : MIBREAST, un projet du CRIG accompagné par SynHERA. Son objectif : concevoir et tester une prothèse mammaire fabriquée grâce à l’impression 3D qui permet aux tissus de se régénérer. 

Ce 4 février, c’était la journée mondiale contre le cancer. A cette occasion, nous avons rencontré Frédéric Oprenyeszk, Docteur en sciences biomédicales et pharmaceutiques. Depuis trois ans, ce chercheur du CRIG (Centre de Recherches des Instituts Groupés de HELMo) travaille sur MIBREAST. Un projet qui pourra, à terme, être une véritable source d’espoir pour les femmes touchées par le cancer du sein et devant subir une mastectomie. L’objectif du projet ? Proposer une technique totalement innovante, naturelle et personnalisable dans le cadre de la reconstruction mammaire : la pose d’une matrice biorésorbable, fabriquée grâce à l’impression 3D ! 

Une méthode qui comporte de nombreux avantages. Tout d’abord, l’impression 3D permet de construire une prothèse « sur-mesure » qui s’adapte parfaitement à l’anatomie des patientes. Frédéric Oprenyeszk explique : « Tout d’abord, le corps de la patiente sera scanné. Cette étape se déroulera avant l’ablation du sein. Avec les mesures obtenues, la forme exacte de son sein sera modélisée puis imprimée comme matrice en 3D ». 

Après cette 1re phase, la matrice va être placée dans le corps de la femme. Et c’est là qu’interviendra l’autre aspect innovant du projet : la régénération du tissu de la patiente. « Le corps va dégrader la matrice progressivement tout en favorisant un réseau de vaisseaux sanguins sur le site. Par après, la technique du lipomodelage, qui consiste à prélever la graisse de la patiente et l’injecter dans le sein, sera utilisée afin de compléter la reconstruction. Petit à petit, la matrice va donc être remplacée par un tissu graisseux qui régénérera le sein à l’identique ». Une méthode naturelle, donc, qui permettra à la patiente de poursuivre sa vie sans avoir à subir les complications qui peuvent être dues à la pose d’un corps étranger, comme une prothèse en silicone (voir ci-dessous).

Soutenu par un First Haute Ecole et sélectionné dans le cadre du Win2Wal

Si c’est avec enthousiasme que Frédéric Oprenyeszk nous parle de MIBREAST, il n’est pas le seul à croire en cette innovation. Soutenus en 2018 par un First Haute Ecole, lui et son équipe ont pu durant deux ans développer ce projet et réaliser les premiers tests précliniques. Des tests dont les résultats se sont d’ores et déjà avérés prometteurs. « Nous avons ensuite travaillé sur fonds propres, puis, avec l’aide de SynHERA, nous avons bénéficié d’un POC (Proof Of Concept) ». Sélectionnée dans le cadre de l’appel Win2Wal 2020, la phase 2 du projet MIBREAST est en cours. « Par la suite, l’objectif est de pouvoir sortir du laboratoire et aller vers une industrialisation du processus. D’ici deux à trois ans, nous espérons pouvoir créer une spin-off ».

Une chose est sûre : MIBREAST, un projet qui pourrait révolutionner la vie de nombreuses femmes touchées par le cancer, va encore faire parler de lui.

 

Un projet interdisciplinaire

Si au sein du CRIG, Frédéric Oprenyeszk est le seul à travailler à temps-plein sur ce projet, MIBREAST est avant tout un travail d’équipe ! Ainsi, il collabore aussi bien avec le département paramédical qu’avec le département technique de la HELMo. Le premier prend en charge des études histologiques et le second l’impression 3D avec Julien Pierre, promoteur du projet et responsable du laboratoire d’impression 3D à la HELMo Gramme.

Le consortium comporte également un industriel, deux chirurgiens plasticiens, le Professeur Jean-Luc Nizet, chef du service de chirurgie plastique et maxillo-faciale et le Docteur Christophe Nizet, interne en chirurgie plastique, au CHU de Liège. Les tests précliniques sont, eux, réalisés au CER Groupe. « C’est la même équipe depuis 2018. Personnellement, j’ai débuté en répondant à une offre d’emploi du CRIG. J’ai réalisé une thèse de doctorat à l’ULiège où j’ai développé un gel innovant, que nous avons breveté, pour traiter l’arthrose. Mes travaux ont mené à la création de la 100e spin-off de l’ULiège », explique Frédéric Oprenyeszk. 

En outre, durant son doctorat, Frédéric Oprenyeszk a réalisé une année supplémentaire pour devenir Maitre d’expériences en science des animaux de laboratoire. « Ce certificat donne l’accès à l’expérimentation animale aux chercheurs. Cette formation m’a appris les différents aspects éthiques, légaux, et techniques en la matière ». Une compétence qu’il a pu mettre à profit avec le projet MIBREAST. Un projet qui l’a tout de suite séduit. « J’appréciais son interdisciplinarité. Avec MIBREAST, le monde des ingénieurs et le monde médical doivent collaborer. De plus, c’est réellement de la recherche appliquée où l’on s’intéresse, avant tout, au bien-être de la patiente ».

Une chirurgie moins lourde et plus naturelle

Actuellement, deux techniques sont utilisées dans le cadre de la reconstruction mammaire. Tout d’abord, la pose d’une prothèse en silicone. Une intervention rapide avec un rendu immédiat qui peut néanmoins présenter des effets secondaires. En effet, dans certains cas, le corps réagira à ce corps étranger en formant une coque autour de l’implant. Le sein se retrouvera alors figé tant au niveau de la forme que lors du touché. L’autre technique ? Celle dite des lambeaux. Elle consiste à prélever un morceau de tissu du dos ou du ventre qui sera implanté au niveau de la poitrine pour reconstruire le sein. Mais même s’il s’agit d’une intervention plus naturelle, elle comporte plusieurs désagréments. En effet, il s’agit d’une chirurgie lourde et mutilante avec une récupération assez longue pour les patientes.  Avec MIBREAST, le chercheur et son équipe espèrent donc pouvoir développer une méthode qui allie les avantages de ces deux chirurgies, en réduisant leurs inconvénients.  

 
 

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